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Tout le monde semble d’accord : la culture numérique, ou du moins une culture numérique de base, est indispensable pour les jeunes comme pour les adultes, pour les enseignants, les étudiants, les élèves, pour le consommateur comme pour le citoyen, au travail comme à la maison.

Cette apparence de consensus cache un méli-mélo de notions parfois très éloignées les unes des autres, de l’achat en ligne à la neutralité du net, de l’accès aux ressources à la co-construction de savoirs…

Pour tenter de m’y retrouver dans cet imbroglio, je me suis plongé, comme souvent, dans le portail lexical du CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) pour m’intéresser au mot culture. Dans cette définition très complète, j’ai particulièrement relevé deux bribes[1] :

  • Ensemble des moyens mis en œuvre par l'homme pour augmenter ses connaissances,développer et améliorer les facultés de son esprit, notamment le jugement et le goût.
  • Qualité, compétence que la possession d'un savoir étendu et fécondé par l'expérience donne à une personne ou à une société dans un domaine de connaissances particulier, à une époque ou dans un lieu déterminé.

Cela ne me dit pas ce qu’est la culture numérique, mais offre au moins deux pistes. La culture numérique est faite de connaissances, de compétences et d’expériences. Et c’est cet ensemble qui permet d’évoluer, d’améliorer ses capacités dans un environnement lui-même très évolutif.

Si l’on veut faire entrer les élèves, les étudiants, les futurs enseignants ou nos collègues actuels dans la culture numérique, il y a une question à se poser : quelle part relative donne-t-on aux connaissances, aux compétences, à l’expérience ?

J’en vois qui fronce les sourcils en m’envoyant un signal le plus fort possible : tu as oublié la question la plus importante « quelles connaissances, quelles compétences ? ».

Mais je persiste : pour moi, l’essentiel c’est de permettre à l’élève/étudiant/stagiaire/collègue d’acquérir de l’expérience. Dans le cadre d’une formation d’enseignants, Je choisis un thème (par exemple « faciliter les interactions en amphi ») et un outil (ici des boîtiers de réponses ou une application en ligne accessible par smartphone). J’apporte le minimum d’informations, de connaissances nécessaires pour une première expérimentation à partir de laquelle chaque collègue pourra décider si, pour lui, la démarche mérite d’être creusée, s’il y a là des connaissances à approfondir, une compétence à acquérir. Dans tous les cas, cela aura enrichi son expérience et donc sa culture numérique. On peut faire le parallèle avec l’apprentissage du code dans l’enseignement scolaire : l’objectif n’est pas que tous les élèves deviennent des programmeurs, mais qu’ils aient une expérience, si minime soit-elle, de la démarche aboutissant à un traitement informatique et à son exploitation.

Dans une démarche académique, il est tentant de lister les connaissances et compétences de bases que tout citoyen se devrait d’avoir en matière de numérique, avec le risque du trop-plein, et de la concurrence avec les disciplines. Je crois plus utile de proposer des situations qui permettent à chacun d’enrichir sa propre expérience. C’est tout à fait compatible avec le caractère transversal du numérique.

À l’université comme dans l’enseignement scolaire, ce qui sera sans doute le plus difficile c’est de dégager du temps pour que les élèves et les étudiants puissent s’y confronter. Dans le cas de notre cours « compétences numériques » à Cergy, nous avons apporté aux étudiants de première année de licence des connaissances et des compétences, mais nous leur avons surtout  fait vivre une expérience importante : suivre un cours totalement en ligne. Et cela a enrichi leur culture numérique, avec en perspective la formation tout au long de la vie.

Thierry Marchand, onef.fr/blog

[1] Ce raccourci est très réducteur : il représente à peine 2% du texte de l'article. Mais c’est ce que je trouve de plus adapté pour être rapproché du mot numérique. 

Dernière modification le vendredi, 04 septembre 2015
Marchand Thierry

Enseignant de mathématiques en collège, puis formateur Tice, j’enseigne maintenant dans l’enseignement supérieur, pour développer les compétences numériques. Je participe à la conception, la mise en place et l’animation de plusieurs MOOC .