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La loi sur la refondation de l’école, votée il y a quelques jours, devra recueillir l’avis du Sénat avant d’être définitivement adoptée en seconde lecture à l’Assemblée nationale avant l’été.
Par la programmation des moyens qui seront donnés à l’éducation nationale et par la refonte des orientations pédagogiques, les fondements d’une École juste et exigeante sont désormais posés même si leurs déclinaisons demanderont nécessairement du temps pour produire leurs effets.
La priorité donnée au primaire pour rétablir les conditions de la réussite scolaire et éducative est un choix politique stratégique alors que la tentation de nombreux gouvernement a souvent été de diluer les moyens sur tous les ordres d’enseignement, quitte à saupoudrer et à rendre très souvent les réformes inopérantes.
 
Premier étage de la fusée de la refondation, la « loi Peillon » devra, au terme de sa programmation, poursuivre dans la même voie en trouvant d’autres moyens et d’autres mesures pour casser le décrochage scolaire et toutes les formes d’exclusion éducatives subies à ce jour.
Pour l’heure la priorité au primaire est affirmée à travers le dispositif « plus de maîtres que de classes », la redéfinition des missions de l’école maternelle et le développement de l’accueil des enfants de moins de trois ans ainsi que l’enseignement obligatoire d’une langue vivante dès le CP.
 
Il restera alors à poursuivre la logique entamée et à revoir les programmes scolaires pour être en cohérence avec la réforme des rythmes qui ne peut pas être que le simple retour de ce qui existait avant la semaine de 4 jours imposée par Xavier Darcos en 2008. C’est à la fois un problème de temps et de contenus !
 
Cette réforme, qui a largement occupée les débats depuis des mois, débutera véritablement dès septembre 2013 pour une partie des écoliers et des communes du pays avant d’être généralisée en septembre 2014.
 
Les réticences et les résistances ont été nombreuses sur tous les territoires comme en témoigne la « carte de passage » alors que les communes pourtant avisées depuis de longs mois ont souvent peiné à se mettre en branle. Pourquoi une telle frilosité quand le consensus semblait quasi général avant la concertation nationale et la rédaction du décret fixant le cadre de la réforme ?
 
Evidemment des raisons économiques ont pu jouer, de nombreuses collectivités voulant se donner à la fois du temps pour construire des projets éducatifs de territoire et appliquer une réforme utile aux écoliers. Le coût de la réforme sera d’abord celui de l’investissement de l’état et des communes pour anticiper les évolutions et créer une nouvelle relation liée sur la co éducation avec les parents : il faudrait, d’ici 5 ans, pour cela 200 à 300 euros par enfants scolarisés, soit environ 1, 5 milliards d’euros.
 
D’autres raisons plus politiques ont aussi eu leurs rôles, le calendrier des élections municipales a accéléré l’inquiétude des maires ne voulant pas que le mécontentement éventuel nuise pendant la campagne.
 
Enfin de nombreux édiles ont paru désarmés face à la technicité du décret et de son application concrète sur le territoire. Ainsi malgré la pédagogie du ministère de l’éducation nationale qui a institué de nombreuses réunions de présentation à destination des élus et publié un guide exhaustif, l’adhésion, même à Gauche ,a eu du mal à se faire alors que de nombreux maires de droite ont préféré dégager en touche.
Pourtant la réforme était mûre puisque des expérimentations positives avaient déjà été menées dans certaines villes françaises, Epinal, Lille ou plus récemment Angers, Brest, Nevers ou encore Lomme.
 
Ces communes ont souvent construit leur projet sur la nécessité de penser globalement tous les temps de l’enfant et de l’élève autour des temps familiaux, scolaires et péri-éducatifs pour lutter contre les inégalités.
 
Le temps scolaire a été redistribué sur cinq jours sous des formes variables, le mercredi très souvent scolarisé, avec des après-midi partiellement ou totalement libérées. (la loi sera d’ailleurs peut être amendée lors de la relecture au sénat pour permettre, dans le cadre du décret, une troisième dérogation offrant la possibilité de libérer un après-midi consacré alors à des parcours culturels ou sportifs)
Les élèves de ces écoles sont dans la majorité des cas moins fatigués et plus attentifs grâce à une plus grande régularité sur la semaine, des journées moins lourdes et un équilibre plus harmonieux entre apprentissages, activités sportives ou culturelles et temps de récupération.
 
Certes la journée n’est pas moins longue mais elle est dans tous les cas mieux articulée autour des apprentissages fondamentaux et des autres temps qui sont eux aussi éducatifs. L’école devient à la fois un lieu d’éducation et un lieu de vie.
Il faudra, au terme de la première année d’application fin juin 2013, réaliser le bilan des projets construits sur les territoires en espérant que chacun aura pris conscience de l’intérêt de revoir la journée passée à l’école.
 
Si le décret fixe le cadre de la nouvelle semaine scolaire, il permet aussi d’imaginer de larges variations d’organisation utilisant d’abord et avant tout les ressources locales en les adaptant, si possibles, à chaque école.
Tous les débats ont ainsi mis en exergue une double nécessité : réduire les inégalités éducatives territoriales (celles-ci vont de 1 à 10 en fonction de l’investissement de la commune) et mettre en place les fondements d’une politique éducative locale.
 
Cette prise de conscience de la « fragmentation éducative » nécessitera demain plus de cohérence et, souhaitons- le, l’obligation légale de créer un projet éducatif de territoire permettant à tous les acteurs éducatifs, parents, enseignants, collectivités et associations, de se saisir pleinement des enjeux locaux liés à l’éducation.
Dernière modification le vendredi, 10 octobre 2014
Caremelle Olivier

Enseignant et militant pour la promotion du service public d’éducation. Adjoint au maire de Lomme, délégué à la culture et au projet éducatif global.