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C’était les 20 et 21 mars, au Grand Barouf organisé par la Métropole Lilloise. " La révolution numérique, aujourd’hui portée par la robotisation et l’intelligence artificielle, met les sociétés post-industrielles sens dessus dessous.  Le Grand Barouf met en avant les controverses en imaginant le futur des politiques publiques. L’événement conçu comme une “session parlementaire” de deux jours, où les participant.e.s deviennent des “députés” réunis en commissions, auditions et séances de question au gouvernement (fictif !). Startupers, citoyens, militants, représentants de grandes entreprises, fonctionnaires, designers... C’est avant tout un lieu de rencontres improbables pour construire, ensemble, les contours numériques de notre société."

Qui gouverne le monde ?

"Il s’est progressivement installé dans notre quotidien, modifiant notre rapport au monde et s’immisçant dans notre intimité. Mais saurait-on dire qui tire les ficelles ? Aujourd’hui, grandes entreprises du net, start-ups, états et citoyens cherchent à faire valoir leurs intérêts et à trouver leurs place dans ce rapport de force. Que se passerait-il si l’on sortait le numérique du contrôle des grandes entreprises ? Si comme à l’origine d’Internet, il était pensé pour contribuer à l’émancipation des individus ? A quelles causes sociales, démocratiques et environnementales pourrait-il se dévouer ?"

https://participation.lillemetropole.fr/assemblies/grandbarouf

C'est donc à un événement atypique que nous convie la Métropole de Lille, une manière d'impliquer les citoyens à une réflexion d'actualité brûlante et d'une complexité déstabilisante. D'ailleurs, les trois questions posées ci-dessous associant la transition écologique à l'usage du numérique le démontrent.

Nous sommes plus que jamais conscients d'un écosystème interdépendant  à l'échelle mondiale, et les questions d'éthique affleurent à tout instant !

Trois questions, trois problématiques qui se concluent par des propositions de loi

Donner nos données, pour le meilleur comme pour le pire ?

Chaque jour, que nous le voulions ou non, nos activités en ligne laissent des traces et viennent alimenter nos identités numériques. Du matraquage publicitaire à la surveillance généralisée, quels problèmes posent nos empreintes numériques ? A contrario, quels usages vertueux peut-on envisager pour nos données : faire avancer la recherche médicale, prédire le crime, améliorer nos services publics… ? Et si cela est vraiment souhaitable, comment s’y prendre ?

Thème 1 : Empreinte numérique

 

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Le numérique va-t-il sauver ou tuer la démocratie ?

Alors que l'administration et la société se numérisent, les inégalités d'usage et d'accès à la technologie demeurent. Les civic tech peinent à tenir leurs promesses de réenchantement démocratique. Les réseaux sociaux deviennent des lieux inédits de démocratie directe, mais leurs algorithmes servent, par essence, des intérêts privés. Alors comment sauver la démocratie ? La réponse est-elle dans encore plus de numérique ou faut-il massivement réinvestir les solutions humaines ?

Thème 2 : Innovation démocratique

 

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Le numérique : pompier ou pyromane du changement climatique ?

Utilisation exponentielle de métaux rares, stockage des données, présence en ligne de plus en plus importante... l’empreinte écologique du numérique s'accroît tous les jours. Et cela n'est pas près de s'arranger car le numérique semble être la solution à tout. Le techno-solutionnisme est-il en train de précipiter notre chute ? Ou, au contraire, peut-on faire rimer numérique avec sobriété et mobiliser son potentiel au profit de la cause écologique ?

Thème 3 : Transition écologique

 

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Comment apprécier ces propositions ?

Les débats, les ateliers de ces deux journées nous permettent de comprendre la complexité engendrée par le numérique en inter - relations avec la société à l'échelle mondiale et de voter sur ces différentes propositions !

Le monde des données : les données à l'échelle du monde par exemple :

Gapminder.org est une fondation qui met à disposition du public les statistiques sur le développement mondial  hébergé chez Google : The Gapminder World.

Il permet de visualiser des corrélations entre les données statistiques des pays et d’animer leur évolution dans le temps.

Les milliards de données doivent être collectées, nettoyées. Il s'agit de les rendre comparables, d'analyser les interactions, de rendre des visuels accessibles..

Découvrir la face cachée des algorythmes autre exemple :

Frédéric Bardolle, a co-fondé Data For Good, une communauté de data scientists bénévoles mais aussi AlgoTransparency, une association qui vise à informer les citoyens sur ce qui se cache derrière les algorithmes. "À la base, les algorithmes sont plutôt neutres. Ce sont leurs objectifs - définis par des humains – qui changent la donne."

On peut lire cet interview réalisé par soonsoonsoon : https://www.soonsoonsoon.com/le-monde-de-demain-selon-Frederic-Bardolle

"Les algorithmes, c’est le remède et le poison : on peut aussi bien réaliser un projet qui permet de savoir à quel moment il faut extuber des patients et potentiellement sauver des vies que détruire des démocraties grâce à du micro-ciblage sur des gens pour leur montrer la vidéo qui va exacerber leur folie.

C’est un outil et c’est ce qu’on en fait qui est important et c’est pourquoi il est nécessaire que ce soit transparent. L’algorithme idéal est un algorithme dont on a fait le choix ensemble, en société. Cela ne veut pas dire que tout le monde sera d’accord mais au moins on saura comment il fonctionne."

Les débats, les ateliers de ces deux journées permettent aux participants de comprendre les interactions entre le monde économique et le déploiement du numérique à l'échelle du citoyen.

S'est posée la question de la dématérialisation des services publics. " Si dématérialisation ne rimait plus avec exclusion ?

Le gouvernement s’est fixé comme objectif 100% des démarches administratives dématérialisées à horizon 2022. Aujourd’hui, déjà, l’accès aux services de Pôle Emploi, de la CAF ou de l’Assurance maladie se font principalement (si ce n’est exclusivement) sur internet. Or, tout le monde n’est pas armé de la même façon face à la complexité administrative. Comment penser les démarches administratives et leur dématérialisation au service de tous les usagers ?

Pour Pierre Mazet, Chercheur en sciences sociales et formateur, la non réponse aux usagers par les automates numériques interrogent ! Chacun a le droit d'avoir une réponse et l'interaction humaine semble plus appropriée ! Il s'agit d'un droit humain fondamental.  

Pour Orianne Ledroit, Directrice de la Mission Société Numérique, il s'agit de savoir "pourquoi faire mieux"  car le service public porte un potentiel de valeurs pour les usagers. Il s'agit d'assurer une continuité des informations antérieures au numérique, d'améliorer les services en personnalisant, d'assurer des relations avec chacun même avec celui qui est moins à l'aise avec la technologie.

Pour les usagers, particulièrement ceux qui ne savent pas ou ne peuvent pas établir des liens avec les services et leurs droits sociaux,  il s'agit d'établir un rapport aux institutions avant le rapport au numérique :  une autonomie administrative avant l'autonomie numérique: de vrais défis, une transformation in design des services publics !

Il est loin le temps où nous pensions que le numérique allait changer le monde !

L'empreinte environnementale liée à l'impact de fabrication sur des populations, à la pollution, au non recyclage est de la responsabilité de tous : les citoyens, les politiques, les entreprises...

Devons-nous accepter le renouvellement incessant des équipements ?

Quel est le modèle économique des acteurs du numérique ?

Comment concilier valeurs éthiques et valeurs marchandes ?

Le numérique va-t-il révolutionner nos sociétés ? Un débat pose ces questions :

La révolution numérique est encore dans toutes les bouches pour expliquer le bouleversement profond de nos sociétés. Qu'a-t-elle vraiment changé en dehors de l'économie ? N'est ce pas un mythe qui alimente une société essentiellement conservatrice ? Si au contraire, la révolution est bien en marche, quelle est la capacité réelle des grandes entreprises du numérique à répondre à un certain nombre d'enjeux de société notamment à travers les données qu'elles récoltent ? Comment favoriser le développement de projets d'intérêt général par des sociétés numériques privées ? Comment concilier intérêts commerciaux et intérêt général ? 

Grégoire KOPP, Directeur de Cabinet, OVH, relie les valeurs éthiques et les valeurs marchandes. OVH, conçu dans une démarche non élitiste, dans une logique de partage open source, dans une démarche autonome garantissant son indépendance a développé une plateforme peu chère et cependant industrialisée, avec un modèle de transparence.

De quel numérique voulons-nous ?

Souhaitons-nous un modèle d'un capitalisme de surveillance ? Comment concevoir des systèmes d'information écologiques et humains ? Comment offrir des services et non de la captation excessive de l'attention par ceux qui l'utilisent uniquement dans des logiques de profit ?

Quels sont les défis ? Les leviers sont à chercher dans la régulation et la gouvernance, dans l'exploration de nouvelles architectures technologiques, dans les formations, dans le développement de bases communes...

Les débats, les ateliers de ces deux journées permettent aux participants de se poser la question de la gouvernance : " Le futur du gouvernement en 2030 "

Serge Novaretti, Responsable de politiques à la Commission Européenne, au sein de la Direction générale CONNECT dans les domaines de la modernisation des administrations, la fourniture des services public numériques, la participation citoyenne et les villes intelligentes.

Il présente les enjeux de nos sociétés en Europe et la capacité du numérique à y répondre, à travers 4 scénarios prospectifs à 2030. Ils viennent nous interroger sur les conditions de succès d'une gouvernance appropriée des technologies numériques.

Scénario 1 : Démocratie DIY: Do It Yourself

Le fossé sociétal s'est considérablement creusé, les gouvernements ne sont pas en mesure de fournir des services publics adéquats. Les citoyens se sentent forts et autonomes, ils sont engagés dans la vie publique en co-créant des services publics de bricolage...

Scénario 2 : Algocracie privée

Le pouvoir sur les données, l'analyse des données et la prise de décision sont entièrement transférés aux sociétés de données multinationales. Qui prend en charge la réglementation ?...

Scénario 3 : Un gouvernement hyper collaboratif

Une gouvernance ouverte : Des citoyens non élus peuvent être délégués sur des sujets ce qui entraine de la co-création et plus de flexibilité. Des temps de discussion peuvent être inclus dans le temps professionnel...

Scénario 4 : Surrégulation 

Les gouvernements gardent le pouvoir et utilisent les technologies pour réglementer...

 Accès au document en anglais : http://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/bitstream/JRC115008/futurgov_web_lq_v2.pdf

Alors, exercice démocratique et numérique : pas simple n'est-ce pas ?

Dernière modification le samedi, 10 septembre 2022
Laurissergues Michelle

Présidente et fondatrice de l’An@é, co-fondatrice d'Educavox et responsable éditoriale.