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Nous venons de vivre seize mois d’une période inattendue durant laquelle il a fallu s’adapter individuellement et collectivement, c’est-à-dire se protéger, d’abord, mais aussi innover, inventer, communiquer, assurer l’essentiel. Chacun a vécu cette crise, car c’est bien de cela qu’il s’agit, de manière très différente mais il est indéniable qu’elle a et va changer nos habitudes, nos relations, nos vies.

Plus de questions que de certitudes dans ces premiers temps de relance des activités scolaires, sociales et économiques.

C’est peu dire que les fonctionnements habituels ont été perturbés : des systèmes que l’on savait imparfaits mais que l’on croyait stables se sont grippés, des déséquilibres se sont créés, des inégalités se sont creusées.

Ainsi les systèmes de communication école, parents, élèves ont été défaillants techniquement et humainement. L’accompagnement fort que le présentiel permettait d’assurer s’est trouvé relâché avec le paradoxe de parents subitement désarmés et d’élèves davantage responsabilisés. Ces derniers ont su, bien souvent, mettre en place des dispositifs d’entre aide très efficaces.

Pour les enseignants, l’impact personnel a été important voire très important.

Ils ont conservé la volonté de maintenir le lien, de faire participer tous leurs élèves, de remplir pleinement leur rôle. Malgré des difficultés de tous ordres et des injonctions parfois contradictoires, ils ont fait preuve d’inventivité, d’ingéniosité. Pour faire face, ils se sont soudés en équipe ; ils ont échangé des solutions et des ressources entre pairs principalement, privilégiant les réseaux privés aux canaux institutionnels. Ils ont expérimenté les classes virtuelles, les visios. Ils se sont « serré les coudes » parce qu’il le fallait.

Cela n’a pas empêché les ressentis individuels d’angoisse, de culpabilité, d’impuissance. Ils ont perçu comme autant d’échecs le mal être de leurs élèves, les lacunes dans les apprentissages, le creusement des inégalités scolaires, sociales et territoriales. Ces échecs ne leur sont pas imputables, bien sûr, mais ils les ont chaque jour sous les yeux et cela ne peut pas les laisser indifférents.

De plus, tout ce qui permettait à l’école de s’ouvrir sur l’extérieur et sur le monde s’est trouvé balayé. La presse n’est plus entrée à l’école pas plus que le sport, la musique ou d’autres formes de culture. Les interventions en établissement ont été impossibles.

Le télétravail des parents n’a pas arrangé la situation et a eu des répercussions sur l’enseignement et les relations avec les familles, différentes là encore suivant les situations, inégales une fois de plus.

Du reste, cette question du télétravail va être un enjeu majeur dans le futur. Vécu par les uns comme un facteur de désocialisation, il est plébiscité par les autres comme porteur de la liberté de travailler où l’on veut et quand on veut. Il va, de toute façon, modifier les relations au sein de l’entreprise mais aussi de la famille. Il va nécessiter des compétences nouvelles et va se poser très vite l’indispensable redistribution des coûts de ces dispositifs entre employeurs et salariés. A mesure que l’étau se desserre autour de la pandémie et malgré toutes les incertitudes qui pèsent encore quant à son devenir et ses conséquences l’adaptation constatée à ces donnes nouvelles a aussi des aspects positifs.

Un exemple : le numérique éducatif a fait davantage de progrès en seize mois qu’en dix ans. Un autre exemple : il va falloir penser l’école autrement ; on le savait déjà mais, maintenant, on touche à l’urgence. Un corollaire : des projets et des dispositifs innovants se sont développés ici et là par nécessité dont des parts sont à évaluer, conserver, pérenniser et diffuser.

Ce n’est pas pour autant que disparaissent doutes et difficultés à se projeter dans l’avenir avec leur lot de questionnements légitimes.

Quelle place sera accordée au numérique ? Quels usages ? Envahissement ou juste place, quels équilibres ? Quelle protection de ses usagers ? Le numérique sera-t-il rejeté après service trop rendu ? Les enseignants disposeront-ils de la liberté de travailler avec les outils qu’ils se sont nouvellement appropriés ? Sauront-ils profiter de cette liberté dont on conçoit mal qu’elle ne leur soit pas accordée ?

La recherche s’est emparée de ces question des usages du numérique à l’école et il sera intéressant de mesurer les écarts entre les résultats des enquêtes réalisées en 2017 et celles qui vont l’être en 2022, après une reprise que l’on espère plus normale de la scolarité.

Quoiqu’il en soit, accélérée par cette crise, cette une vague (encore une) qui agite le monde numérique.

Pour désigner la dite vague, le terme de tsunami étant déjà utilisé, voire galvaudé et portant en lui des angoisses superflues, c’est le terme plus doux de « mascaret » qui a été proposé. (Le mascaret est une belle et longue vague fluviale formée par le jeu des marées à fort coefficient sur la Dordogne et la Garonne notamment et sur laquelle de nombreux surfeurs se plaisent à glisser pour le plus grand plaisir des spectateurs non moins nombreux qui se massent sur les rives.) https://www.educavox.fr/alaune/notre-monde-numerique-subit-un-mascaret

Dans les mutations qui se profilent pour l’école et la société, nous avons tous bien évidemment un rôle à jouer. Réflexions et prospectives surferont sur ce Mascaret numérique ...

Que viennent donc des temps moins inattendus ...

Un bel été à vous tous !

Le Conseil d'Administration de l'An@é

Propos recueillis par Jacques Puyou

Dernière modification le lundi, 05 juillet 2021
An@é

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