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Au cours des deux dernières années, le Groupe de Travail numérique (GTnum) « Renouvellement des pratiques numériques et usages créatifs du numérique et IA » (Scol_IA) a rassemblé des dizaines de personnes de tout horizon pour étudier le potentiel pédagogique et les limites de l’intelligence artificielle (IA) appliquée au domaine de l’éducation. Ce contexte de recherche est singulier à deux égards : d’abord, le déploiement de l’IA en éducation est déjà entamé et la réflexion pédagogique qui l’accompagne est animée par une certaine urgence d’agir.

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Le livre blanc édité par Margarida Romero, Laurent Heiser et Alexandre Lepage vise apporter aux différents acteurs éducatifs un éclairage diversifié tant des enjeux de l’acculturation et formation à l’IA que des ressources et retours d’expérience des différentes équipes de recherche et organismes de culture scientifique de la francophonie.

Une approche pluridisciplinaire permet de considérer tant les perspectives des chercheurs en sciences de l’informatique, que celles des sciences de l’éducation et de la formation, les sciences de l’information et la communication et l’expertise des professionnels de l’enseignement et de la médiation scientifique.

En s’impliquant dans la réflexion sur l’IA à l’école, l’équipe cherche à donner des repères pour que l’intégration de l’IA à l’école soit réussie et qu’elle profite aux élèves comme aux enseignants.

Margarida Romero et Laurent Heiser, Laboratoire d’innovation pour le numérique en éducation, Université Côte d’Azur, Ludovic Dibiaggio, Skema Business School, Alexandre Lepage Université de Montréal indiquent dans l'introduction :

Les défis sociaux auxquels nous faisons face appellent à la l’actualisation des modèles pédagogiques.

A contrario de certains domaines techniques, où l’utilisation de systèmes d’IA peut produire des résultats aux avantages consensuels, l’éducation est un contexte particulièrement marqué par la richesse des relations humaines.

De ce fait, il faut apprendre à distinguer deux types de situations : d’une part, celles qui nécessitent une intervention humaine pour compléter les résultats proposés par un algorithme (par exemple pour des décisions liées à l’orientation, le décrochage, le mentorat ou encore l’obtention d’un certificat) et, d’autre part, les situations qui ne nécessitent plus aucune intervention humaine (résultats fournis par un algorithme adaptatif).

D’emblée, il convient de présenter quelques définitions pour le lecteur non spécialiste.

Le terme « intelligence artificielle » (IA) recouvre un ensemble de théories et de techniques qui traite de problèmes dont la résolution fait normalement appel à l’intelligence humaine.

Aujourd’hui, l’IA s’appuie principalement – mais pas seulement – sur l’apprentissage automatique, que certains connaissent sous le terme anglais de machine learning.

L’apprentissage automatique exploite des méthodes mathématiques pour analyser de grands ensembles de données (dites données massives ou big data) et identifier des tendances (corrélations, similarités, patterns). De cette analyse découlent des modèles permettant de prédire, parfois avec des taux d’exactitude impressionnants, certaines variables comme les résultats scolaires ou le risque de décrochage. Les modèles d’apprentissage automatique peuvent aussi être employés pour des problèmes de classification où l’on cherchera à identifier l’appartenance à un profil d’apprenant en vue d’adapter des actions.

L’IA, une jeune science

Depuis les années 1950, l’IA est un domaine de recherche foisonnant mélangeant mathématiques appliquées et psychologie. Les techniques ont évolué, plusieurs définitions ont été proposées, mais l’idée de repousser les limites des actions humaines pouvant être automatisées demeure centrale. On parlera tantôt de prise de décisions, tantôt d’aide à la décision, mais il demeure que l’IA affiche l’ambition de modéliser certaines facultés mentales de l’être humain.

De nos jours, avec la multiplication des ensembles de données massives, le raffinement des méthodes d’analyse et la visibilité de certains projets qui stimulent l’imaginaire collectif comme les voitures autonomes, les applications potentielles de l’IA dans différents domaines de connaissances connaissent un essor important.

Ce livre blanc a l’ambition de livrer un éclairage scientifique sur les outils et modèles d’apprentissage automatique, à la fois supports pédagogiques et outils expérimentaux permettant d’approfondir notre compréhension du fonctionnement de l’apprentissage humain. Il présente une science en train de se faire, ouverte à la discussion, et non un discours établi et prescriptif.

Les débats théoriques et les rapports d’expériences réalisés dans des environnements scolaires ou dans l’enseignement professionnel nous racontent un métier en évolution, celui d’enseignant.

Les différentes expériences menées dans le cadre du GTnum Scol_IA mettent aussi en évidence les difficultés rencontrées par les acteurs éducatifs. Nous devons tenir compte des compétences de ces derniers et de
l’acculturation sous-jacente à l’intégration de l’IA, tant dans les systèmes formels d’éducation que dans les systèmes informels.

L’ouvrage est structuré en deux parties.

La première concerne les pratiques émergentes d’enseignement de l’IA auprès de différents publics
principalement scolaires. Ainsi, les chapitres 1 à 4 présentent des réalisations issues de l’éducation ou de la médiation scientifique qui peuvent inspirer l’actualisation des pratiques enseignantes dans les écoles.

La seconde partie de l’ouvrage propose un recul réflexif pour aborder une question fondamentale : quelle place devrait occuper l’IA en éducation ?

Les chapitres 5 à 9 présentent des situations portant tant sur des contextes d’éducation formelle et informelle, mais également des activités pour l’acculturation et la formation à l’IA. Les usages de l’IA en éducation sont abordés à partir du modèle #5c21 (Romero et al., 2017).

Selon ce modèle, tout usage du numérique se situe sur un spectre en cinq niveaux allant de la consommation passive à la co- création participative de connaissances.

Nous cherchons en particulier à mettre en valeur les usages de l’IA comme moyen de conduire des activités renforçant la créativité en tenant compte des contextes et niveaux éducatifs différents (Heiser et al., 2022).

C’est pourquoi nous proposons une échelle des usages créatifs de l’IA en éducation.

Aux premier et deuxième niveaux se situent les usages de l’IA qui n’engagent ni l’apprenant ni l’enseignant de manière créative. Aux troisième et quatrième niveaux sont représentés les usages de l’IA qui soutiennent la créativité individuelle ou collective.

Finalement, au cinquième niveau, les usages de l’IA en éducation soutiennent la résolution créative de problèmes à visée participative ou sociétale. Nous espérons que le livre aidera les enseignants à imaginer des activités poursuivant cette ambition.

Accès au livre blanc :

https://hal.science/hal-04013223

Margarida Romero, Laurent Heiser, Alexandre Lepage (Dir.). Enseigner et apprendre à l'ère de l'intelligence artificielle. Canopé. Livre blanc, 2023. ⟨hal-04013223v2⟩

Licence

Paternité - Pas d'utilisation commerciale - Partage selon les Conditions Initiales - CC BY 4.0

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Dernière modification le lundi, 15 mai 2023
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