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Combien d’infortunés parents d’élèves avons-nous rencontrés attendant ce fameux “déclic” de leurs enfants à l’école ?

 “Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?” demandait l’épouse de Barbe bleue à sa sœur, espérant sa propre libération d’une source extérieure au lieu de prendre ses jambes à son coup et de se libérer soi-même...

Ces parents et donc leurs enfants sont tels cette jeune épouse malheureuse. Plutôt que de réussir à prendre leurs destins en main grâce à leur motivation intrinsèque, ils se reposent sur l’école et attendant de ses preux chevaliers, une motivation extrinsèque.

Or, ce fameux “déclic” que nous attendons tous et qui est si polysémique puisqu’il sous-entend motivation, travail, rigueur, autonomie, maturité... relève de cette motivation intrinsèque et non pas de l’autre.

Motivation extrinsèque

La motivation extrinsèque est contrôlante, c’est à dire qu’elle repose sur un système d’action-récompense, que les Behavioristes appelaient dans les années 1970, le “renforcement”.

La motivation est ce qui nous met en mouvement, il s’agit là d’une force extérieure qui nous met en action et qui attend une “sanction” ou une récompense suite à cette mise en mouvement. Ce type de motivation provoquée, induit une pression interne, un effort car elle diminue le libre-arbitre, elle est contrainte, téléguidée. La récompense, que ce soit une note ou une appréciation est perçue comme un moyen de contrôle et non d’autonomie.

Motivation intrinsèque

Il s’agit également de ce que l’on appelle la motivation auto-contrôlée celle faite de plaisir, d’intérêt, de challenge et de curiosité.

Cette motivation permet à l’individu d’exprimer une de ses valeurs propres. Elle est efficace et surtout durable car elle offre un sentiment d’adhésion et surtout de libre arbitre. Les effets en sont bénéfiques sur la santé mentale et la performance, sur le bien-être et l’estime de soi. Elle est un des remèdes au burn-out de l’enfant, phénomène de plus en plus fréquent et de plus en plus jeune.

Cette motivation intrinsèque est difficilement possible après l’école élémentaire et avant le lycée car c’est à partir de la seconde que l’élève commence à faire de véritables choix d’apprentissages : il a davantage de libertés, de choix d’options, de spécialités ... et donc de motivation.

Pourquoi et quand essaye-t-on de motiver un élève, un enfant?

Lorsque l’on voit que celui-ci n’a pas envie (de travailler ou pire de se lever)

La motivation est un processus, ce n’est pas un trait de personnalité.

Ce processus dépend de l’environnement de proximité, des interactions sociales et familiales. Quelqu’un est motivé quand il y a une détermination, un effort, un changement de comportement pour atteindre un objectif précis, une récompense attendue qui peut être un besoin, du bien-être, de la reconnaissance.... Parfois la récompense guide la motivation ou au contraire l’annihile, c’est que l’on appelle “l’effet de sape.”

Pour motiver un élève il faut penser à creuser l’ambivalence entre l’envie et la non-envie, à l’interroger, à explorer les motivations pour faire et ne pas faire et finalement laisser la personne décider après cette exploration.

Sinon, l’on assiste à un phénomène inverse, celui de la “réactance”, c’est à dire qu’il s’agit d’une réaction de mécanisme de défense psychologique pour tenter de maintenir sa liberté d’action quand il se croit menacé. La réactance est d'autant plus importante lorsque l'individu se sent poussé à croire ou faire quelque chose. C’est un des écueils de l’école et du collège particulièrement lorsque la motivation est seulement guidée par l’extérieur de l’élève.

 

Pour motiver un élève de collège, il sera donc important de définir des critères clairs et réalistes, réalisables pour provoquer un mouvement, un effort, et ne pas oublier de renforcer l’effort en encourageant. Ne pas oublier non plus de contractualiser l’effort (attention, ce n’est pas la même chose que le chantage de la note), c’est à dire, pas à pas, de valoriser le progrès aux yeux des autres (famille, camardes, professeurs) et bien expliciter le fait que travailler à l’école c’est surtout pour ne se fermer aucune porte.

Le monde professionnel de demain aura besoin d’agilité intellectuelles et de personnes rapidement adaptables, flexibles.

L’élève, pour se motiver, a besoin d’un lien social, d’un regard accueillant et d’une sensation de progrès, de sentir une progression vers la prise de liberté...la sienne

Dernière modification le mercredi, 16 décembre 2020
Roux Delphine

Deputy Head du collège EIB Monceau à Paris