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Dans notre monde globalisé, la société est marquée par les technologies numériques qui gagnent une influence toujours plus grande dans les domaines économiques et culturels.

Alors que 4 milliards d’humains sont connectés (55 % de la population mondiale), les jeunes attachent une importance croissante aux connexions numériques qui leur permettent de construire une grande part de leur sociabilité entre pairs (les 13-17 ans envoient chacun entre 4000 et 6000 sms par mois).

Utilisation des données : risques et opportunités

Dans ce contexte, l’Éducation nationale, entrée dans l’ère du numérique (Loi d’Orientation et de programmation du 8 juillet 2013), produit un grand nombre de données liées à la vie scolaire, aux évaluations et aux résultats des élèves. Ces données personnelles sont collectées et stockées, et peuvent devenir des vecteurs d’innovation (individualisation des apprentissages, recherche, aide au travail personnel…), à la condition expresse qu’elles soient protégées pour être valorisées.

Leur utilisation présente à la fois risques et opportunités. De grandes innovations sont attendues via le traitement des données en éducation, notamment par l’exploitation des traces numériques d’apprentissages générées par l’utilisation des outils (modélisation des pratiques pour créer un profil individuel par exemple).

S’il est clair que la valorisation des données permet des avancées majeures, il est tout aussi indispensable que ces données soient protégées, car ce sont des données personnelles :  identité numérique, performance scolaire, sécurité… Alors, le cadre proposé est-il aujourd’hui suffisant pour entraîner la confiance des acteurs du système éducatif ? Une stricte observation des règles éthiques dans le traitement de ces données est attendue de la part de l’institution scolaire, notamment par la mise en œuvre du RGPD (Règlement général sur la protection des données). Il est désormais évident que les données (Big Data) sont une source inépuisable de profits pour l’économie et qu’il y a donc matière à précautions afin d’éviter la marchandisation de ces données via des éditeurs, des entreprises de services numériques, des moteurs de recherches ou des plateformes d’échanges.

Politique éducative et éthique

Parallèlement se pose la question de l’éthique de la politique éducative, en ce sens qu’elle doit être mise en œuvre uniformément et gratuitement pour l’usager dans l’univers scolaire afin que personne ne soit laissé sur le bord du chemin en raison d’un accès inégal aux réseaux ou à une culture numérique insuffisante.

Dans ce domaine, les collectivités territoriales sont questionnées aux côtés des chefs d’établissements et des enseignants, car au quotidien la conduite d’une éducation numérique se heurte à de nombreuses difficultés matérielles et organisationnelles.

A supposer que soient résolues toutes les questions liées à la mise en œuvre technique d’une pédagogie par et au numérique - ce qui est loin d’être le cas dans tous les territoires - nous devons nous interroger sur la nature de l’éducation que nous voulons proposer aux élèves et à leurs familles, car il n’est pas admissible d’entrer par la seule porte des outils, des applications et des techniques pédagogiques. L’éducation ne saurait être au service de l’économie numérique, car il est difficilement admissible que l’éducation au et par le numérique  ne soit pas exclusivement au service de l’humain et d’une formation humaniste (concept des Humanités numériques).

Comment mettre en oeuvre une politique éducative d’un point de vue éthique dans une société connectée afin d’inclure culture numérique et éducation pour tous ?

Dans quelles démarches pédagogique et didactiques cette politique doit-elle s’inscrire pour éduquer la nouvelle génération dans une perspective citoyenne et humaniste au-delà des enjeux consuméristes évidents?

Comment former les citoyens numériques du 21ème siècle, si ce n’est en poursuivant des objectifs ambitieux tels que ceux de l’Education aux médias et à l’information (EMI inscrite dans la Loi de 2013) et en éduquant les élèves à l’esprit critique qui leur apprendra l’autonomie face à la profusion d’informations qui les assaille : apprendre à sourcer l’information, à la vérifier, à la comparer tout en respectant dans son activité personnelle les valeurs inscrites dans les chartes d’usage des médias et des outils numériques utilisés.

L’école a ici un rôle majeur à jouer dans la formation du nouveau citoyen numérique.

Comment aussi sauvegarder l’indépendance des enseignants vis à vis des entreprises de service numérique dont certaines pratiques insidieuses peuvent tromper la vigilance et introduire une forme de dépendance, voire de subordination ?

Comment sauvegarder les valeurs d’une éducation humaniste dans un contexte numérique en constante évolution vers un consumérisme croissant ? 

Telles sont les questions auxquelles nous tenterons de répondre au cours de la table ronde organisée par l’An@é le 22 novembre 2019 à 10h45 dans le cadre du Salon Educatec-Educatice (Porte de Versailles).-Programme du vendredi-

Animateur : Michel Pérez, président de l’Association nationale des @cteurs de l’École.

Intervenants : Mme Sabrina Caliaros. Déléguée académique au numérique, académie de Montpellier, Mme Carina Chatain. Responsable de l’éducation au numérique, responsable du pôle Educnum, CNIL (Commission nationale informatique et libertés), M. Damien Dubreuil. Principal du collège Jean Lartaut de Jarnac (16), Mme Michelle Laurissergues. Responsable éditoriale d’Educavox.

Dernière modification le mardi, 05 novembre 2019
Pérez Michel

Président national de l'An@é de 2017 à 2022. Inspecteur général honoraire de l’éducation nationale (spécialiste en langues vivantes). Ancien conseiller Tice du recteur de Bordeaux, auteur de nombreux articles et rapports sur les usages pédagogiques du numérique et sur la place des outils numériques dans la politique éducative.