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Invité à participer à la concertation nationale lancée par Vincent Peillon sur la refondation de l’école, j’ai rejoint avec plaisir l’atelier qui planche sur les rythmes éducatifs.

Le sujet, sensible depuis des années et encore plus depuis la réforme de la semaine des quatre jours imposée par Xavier Darcos, est aujourd’hui sur la table de la concertation, offrant l’opportunité à beaucoup, parents d’élèves, organisations syndicales, élus… d’exprimer leur avis et suggestions.

Il n’est guère étonnant donc que les premières séances de travail foisonnent et génèrent des débats contradictoires avec un fil conducteur, largement partagé, celui de l’intérêt des élèves et des enfants pour une amélioration substantielle de la manière de « vivre l’école » tout au long des temps scolaires : l’année, le trimestre, la semaine et la journée.

Le Ministre a aujourd’hui de nombreuses cartes en main pour (bien) mener la réforme des rythmes éducatifs : la légitimité démocratique issue des élections pendant lesquelles l’école a fait débat, un consensus large sur la nécessité de refonder l’école et en particulier de supprimer la semaine des quatre jours, des moyens conséquents au service de cette refondation qui permettraient d’anticiper une nouvelle façon de faire école notamment pour le primaire.

Rien ne serait plus inefficace de se contenter de supprimer la semaine de quatre jours pour rétablir un nouveau calendrier annuel et hebdomadaire dans lequel le retour au mercredi matin scellerait les débats pour l’éternité.

L’occasion nous est donnée aujourd’hui d’aller beaucoup plus loin puisque la question des rythmes pose aussi de nombreux autres sujets liés aux apprentissages, aux lieux de travail ou encore à la place des collectivités sur l’acte éducatif.

La question du temps scolaire ne peut être déconnectée de celle des programmes et des apprentissages qui méritent d’être revus au regard des critiques sur le socle commun et de la manière de considérer tout le temps passé à l’école. Celui-ci ne se résume pas aux seules heures de cours mais comportent aussi d’autres temps éducatifs, plus ou moins bien identifiés, notamment sur les activités périscolaires devenues un enjeu important des débats.

Nous réussirons clairement la réforme à la condition, sur ce point, de considérer globalement le temps passé à l’école dans lequel interviennent les enseignants mais aussi de nombreuses autres personnes : les ATSEM, le personnel de restauration et les animateurs des temps périscolaires lorsque la commune a, ce n’est pas toujours le cas, les moyens de les financer.

Ainsi au-delà des polémiques sur le calendrier des vacances, (faut-il ou non raccourcir les vacances d’été et uniformiser le rythme de 7 semaines travaillées et de 2 semaines de repos ?) l’essentiel du débat doit porter sur la semaine et la journée passée à l’école au regard de tous les apprentissages.

Il n’est pas anodin à ce sujet que les communes qui ont anticipé la réforme et créer des expérimentations soient pour la plupart convaincues de la pertinence d’organiser la semaine scolaire sur cinq jours avec notamment le retour du mercredi matin.

Il n’est pas anodin que ces mêmes communes (Angers, Lyon, Brest, Nevers, Lomme) aient saisi tout l’intérêt de créer une « nouvelle journée » permettant de rendre poreux les temps scolaires, périscolaires et extra scolaires.

Au regard des attentes des parents et des enseignants qui ont participé à la conception de ces expérimentations, toutes les garanties pédagogiques ont été donné pour créer une plus value éducative alors que les évaluations en cours seront bientôt rendues.

C’est l’arbitrage que la commune de Lomme a pris dans le cadre de l’expérimentation de l’aménagement du temps de l’enfant au groupe scolaire Lamartine / la Fontaine créant un projet commun entre la ville, les enseignants et les parents pour initier à la fois un autre rythme privilégiant les matinées et une complémentarité entre les apprentissages scolaires et « les parcours éducatifs » pris en charge par la commune sur les après midi libérées.

Sans préjuger de la finalité des travaux et des décisions qui seront rendues par le Ministre, les collectivités, communes et départements, durablement impliquées sur leurs territoires au titre des projets éducatifs locaux militent pour une réforme ambitieuse dans laquelle elles pourraient prendre une place plus importante au-delà des expérimentations menées ici ou là.

La définition d’un cadre national réformant les rythmes éducatifs devra nécessairement prendre en compte l’enjeu des politiques éducatives locales alors que la problématique de leur financement a été maintes fois relevée inquiétant parents et organisations syndicales sur les risques d’une école à plusieurs vitesses.

La loi doit à présent reconnaitre aux communes et aux départements leur qualité d’acteurs éducatifs aux côtés de l’Education Nationale tout comme l’importance de leurs projets éducatifs locaux pour assurer l’égalité éducative territoriale attendue par tous.

La loi doit à présent régler les problèmes des inégalités éducatives territoriales en remettant à plat et en simplifiant tous les dispositifs existant (PEL, CCUS…) pour organiser un cadre commun fortifiant le lien entre les communes et leurs écoles.

Ces deux enjeux, lourds de conséquences notamment financières, dépassent et de loin celui d’un débat tronqué autour de la semaine de quatre ou cinq jours…

Caremelle Olivier

Enseignant et militant pour la promotion du service public d’éducation. Adjoint au maire de Lomme, délégué à la culture et au projet éducatif global.