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Quel sens donner au titre du texte que je propose ici, est-ce le rôle de l'école de construire la personnalité de l'élève ou n'est-ce que celui des parents de manière exclusive ? Voilà bien le questionnement qui est au coeur d'un débat que j'aime bien au fond mettre parfois sur la table.

On me rétorque souvent que j'ai tort de demander ainsi au système éducatif de jouer ce rôle car au fond, on imposerait déjà beaucoup trop de missions à l'école aujourd'hui et celle-ci ne pourrait plus tout assumer. On me dit aussi que l'école ne doit pas remplacer les parents dans la construction éducative des enfants. Je ne suis certes pas compétent en pédagogie scolaire et le suis-je davantage en pédagogie de la vie, sans doute pas non plus, il faut bien se l'avouer ici ! Pour tout être humain, ce serait même prétentieux de se décerner ce titre parce que notre modeste expérience de la vie ne peut que s'ajouter aux multiples autres expériences de personnes qui ont certainement vécu de si belles et si riches aventures personnelles dont elles pourraient témoigner avec enthouisame et dont on pourrait en tirer des leçons de vie sur un plan personnel.

Cependant, je reste profondément convaincu que l'école, par une nouvelle approche de la pédagogie, que je qualifierais d'humaniste, peut demain ouvrir les élèves sur ce qui est l'essentiel pour tout être humain, sur ce qui peut donner sens dans l'existence.

L'Education Nationale se cherche depuis si longtemps en refondant sans cesse la pédagogie, en réfléchissant par exemple sur les programmes, le système de notation, les diplômes, sur l'importance ou non de telle ou telle discipline, sur le port de l'uniforme, la mixité en classe, etc... Plusieurs courants s'affrontent et les enseignants, souvent au milieu et pris en otages, doivent sans cesse se remettre en question en changeant leurs méthodes ou en subissant d'autres qui leur sont imposées parce qu'on juge au sommet, que ce sont les meilleures pour leurs élèves. Il n'est de voir, avec effroi, le nombre de réformes que l'Education Nationale a pu pondre depuis des décennies et rien, bien souvent, ne semble satisfaisant. J'avoue que ce n'est certainement pas moi qui peut ici donner la ou les méthodes miracles pour assurer l'enseignement le plus parfait aux élèves et je laisse cela aux spécialistes, en disant cependant que les mieux placés pour améliorer les choses restent tout de même les enseignants de terrain, les chefs d'établissement, encore faut-il prendre le temps de les écouter ??!!...

Non, ici, je voudrais revenir à cette approche dont je parle plus haut, celle de la pédagogie de l'humanisme qui, à mon sens, n'est pas suffisamment prise en compte.

Par certains côtés, la formation des enseignants est assez sectorisée dans le sens où certains seront surtout formés pour dispenser des cours de maths, d'autres de français ou encore d'autres de sciences, etc... Dans le primaire, ils sont, si l'on peut dire, plus "généralistes" en dispensant aux élèves un peu toutes les matières de base, dont la lecture et l'écriture dont l'acquisition est si importante et si déterminante pour la suite. Et puis, quelques bases, dans la formation des enseignants, sont données sur l'éducation à la citoyenneté, sur les valeurs de la République, etc... et on s'aperçoit d'ailleurs aujourd'hui, avec la survenue de certains évènements dramatiques et déstabilisants, que l'on n'avait sans doute pas suffisamment pris en compte cette dimension à l'école et c'est bien de remettre cela au goût du jour, si je puis dire ! Mais au fond, comment aborder cela en classe et est-ce que l'on ne va tomber encore une fois dans ce travers qui consisterait à parler de ces valeurs fondamentales, qui font notre République, de manière froide en récitant ainsi une lithanie de lois, de précepts pour se donner bonne conscience et surtout sans susciter le moins du monde l'ouverture réelle et libre de l'élève sur le monde et sur les êtres si différents et si riches humainement qui le composent. Voilà bien mon questionnement !

Le monde ne cesse d'évoluer à une rapidité foudroyante et sans doute faut-il sortir d'un certain archaïsme composé de dogmes et de certidudes toutes faites dans l'Education Nationale !

Tout, organisé du haut de façon pyramidale et contraint, est souvent trop ficelé à l'avance et l'enseignant ne doit pas trop sortir des sentiers battus pour faire son métier, si exaltant pourtant. C'est la fuite en avant et les élèves doivent ingurgiter un programme à toute vitesse au risque de frôler l'indigestion, seule la réussite individuelle compte à travers l'obtention de diplômes et nous formons plus des têtes bien pleines que des individus ouverts sur le monde, ouverts sur les autres. Malheur d'ailleurs à celui qui ne suivra pas le rythme, il est condamné d'avance ou relégué à un rôle de seconde zone. Il y a bien, il est vrai, une école pour tous, mais aussi une école privilégiant l'élitisme réservé à certains au détriment des autres, d'où aussi la fracture sociale qu'on entretient ainsi et dont on parle souvent. Même les futurs enseignants sont victimes de cet élitisme depuis quelques années. Le système a par exemple imposé la masterisation qui a fait que l'on a écarté des gens qui possédaient en eux la vocation au départ, mais qui étaient recalés car ils ne pouvaient atteindre le niveau requis, considéré d'ailleurs par certains comme exagéré, pour enseigner, un comble tout de même ! On a ainsi privilégié ceux qui étaient d'abord doués pour les études, mais pas forcément de bons pédagogues à coup sûr, à ceux qui souhaitaient vraiment et ardemment enseigner avec juste les bases nécessaires à acquérir dans la formation.

Et c'est sans doute tout ce carcan, cette lourdeur du système qu'il faut faire exploser pour amener une autre éducation permettant aux élèves de se construire en même temps qu'ils étudient.

Nous devons en effet les ouvrir sur le monde, sur les différences en matière de façons de vivre, de religions, de couleur de peau, etc... Cette laïcité, dont on parle, ne doit pas être sectaire, moralisatrice, mais ouverte sur l'universel pour faire des élèves des êtres tolérants, ouverts aux autres et cherchant à comprendre le monde qui les entoure. Dans ce domaine, rien ne pourra se faire sans ouvrir le débat en classe pour que les élèves expriment leurs désirs, leurs inquiétudes aussi face au monde qu'ils observent tous les jours. Ils sont le devenir de notre humanité et ils ne doivent pas sortir du cursus scolaire ou universitaire en étant habités par le fatalisme, la résignation, mais plutôt par l'espérance qui fera qu'ils seront en capacité de changer les choses et de s'engager aussi pour le bien commun. Arrêtons de faire de nos chères "petites têtes blondes" que des machines à apprendre, mais que ceux-ci deviennent surtout des êtres humains en capacité de posséder une liberté d'expression et d'agir pour peser sur les choses là où ils vivront.

Pour cela, nous devons laisser davantage aux enseignants plus d'autonomie dans leur pédagogie, qui ne peut pas être tout à fait la même suivant l'endroit où ils enseignent et suivant aussi les élèves qu'ils ont en classe.

L'important, c'est d'arriver à créer une harmonie qui ne cherche pas à balayer mais plutôt à additionner les différences, à respecter le rythme et la façon de vivre de chacun. L'école doit être là aussi pour provoquer la rencontre de tous les milieux sociaux, de tous les courants de pensée et c'est comme cela que l'on créera plus de mixité sociale, moins de racime, de discrimination, de rejet de l'autre. Que je sois étranger, ou noir de peau, ou encore handicapé, ou encore juif, musulman, catholique, athée...., peu importe, dès l'école, je me dois, avec l'aide de mon professeur, d'aller vers l'autre, vers tous les autres. En effet, les élèves sont avant tout de futurs citoyens qui seront des adultes responsables de la société qu'ils devront construire ensemble, au lieu d'avoir la tentation de s'ignorer et de créer ou d'entretenir des barrières morales qui ne s'inventent que parce que la conscience l'a décidée, hélas, mille fois hélas ! C'est sans doute cela, pour finir, ce que doit être "le regard humain qui s'apprendrait à l'école", mais est-ce que les instituts de formation des enseignants sont prêts à intégrer cette dimension dans leurs modules, voilà bien mon dernier questionnement pour lequel j'attends une réponse depuis si longtemps !!.... A 56 ans, je continue à vivre dans l'espérance que tout cela soit pris en compte et se réalise pleinement........... qui vivra, verra, n'est-ce-pas !

Dernière modification le mardi, 19 mai 2015
Gillet Guy

Initiateur de l'asso festive et humanitaire "Je bouge pour les autres"  Site : http://pourlesautres.fr - Ancien Responsable-bénévole (au Téléthon - au Secours Catholique - à Saint Vincent de Paul) - Editorialiste libre à vocation éducative, pour défendre des valeurs fondamentales, afin de susciter le débat et l'engagement de tous
Mes Editos sont LIBREMENT utilisables par tous : http://echangessolidaritefraternite.centerblog.net/