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Après tout, n’est-ce pas, il n’y a pas de raison d’être inquiet… Les grognons et les fâcheux ne cessent de nous alarmer, menaçant, vitupérant, ressassant leurs alertes intempestives, brandissant leurs obscurantistes calicots. On n’entend plus qu’eux et, en effet, il y aurait, à les entendre, de quoi fortement s’inquiéter si la raison, dont la présence émancipatrice et la force sont une constante de l’école, ne nous conduisait pas à adopter à leur égard l’attitude indifférente et méprisante qu’ils méritent.

Ainsi pourquoi faudrait-il s’inquiéter du fait que des élèves frappent et séquestrent leurs professeurs et leurs conseillers d’éducation au prétexte futile que ces derniers leur auraient confisqué leurs téléphones mobiles ? Aucune raison de s’inquiéter en effet, les règlements intérieurs et l’attitude généralement bienveillante des chefs d’établissement permettant de mettre un peu de baume au cœur de ces enseignants désarçonnés…

Pourquoi faudrait-il s’inquiéter du fait que les élèves tentent, par tous les moyens, de transgresser les consignes, les interdits et autres dispositifs techniques pour accéder, malgré tout, à leurs réseaux sociaux favoris, en toutes circonstances, sur leurs propres appareils ou sur les ordinateurs en classe ou dans les centres documentaires ? Il n’y a aucune raison de s’alarmer d’un tel comportement, leurs tentatives seront vaines, de toutes façons, les filtres sont efficaces…

Pourquoi faudrait s’inquiéter aussi du fait que les élèves tentent d’accéder, à l’occasion des contrôles ou des examens, aux données qu’ils ont stockées ou qui sont disponibles en ligne ? Il y a fort heureusement des brouilleurs pour détecter les tentatives de ce genre et les surveillants ont l’œil…

Pourquoi donc faudrait-il s’inquiéter du fait que les élèves recopient, en réponse aux questions qu’on leur pose, des paragraphes entiers trouvés sur Internet, dans Wikipédia ou ailleurs ? S’ils continuent à le faire, on leur mettra zéro, c’est simple à résoudre…

Pourquoi s’inquiéter encore du fait que les mêmes élèves s’obstinent à vouloir collaborer, construire des savoirs partagés et fournir des réponses collectives alors que l’évaluation qui leur est proposée est individuelle ? La réponse est simple, voir le paragraphe précédent…

Pourquoi chercher de nouveau une source d’inquiétude dans le fait que les élèves sont aujourd’hui en capacité d’accéder à un volume de connaissances au moins égal à celui de leurs maîtres ? Ou encore qu’ils soient capables de vérifier en permanence ce que ces derniers leur disent ? Ou qu’ils disposent parfois de compétences techniques voire sociétales supérieures et bien plus affinées ? Aucune inquiétude à avoir, tout ça ne sont qu’épiphénomènes qui vont peu à peu se réguler…

Pourquoi s’inquiéter du fait que les élèves exercent, sur des blogues en ligne ou sur les réseaux sociaux, leur droit à s’exprimer, comme on le leur recommande d’ailleurs, mais de manière parfois anarchique et fort peu respectueuse des hommes et des institutions ? Pourquoi s’inquiéter qu’ils donnent leur opinion à tout propos ? Ils connaissent parfaitement les limites légales qui sont assignées à cette liberté et n’en abuseront pas, c’est une certitude…

Pourquoi s’inquiéter dans le fait que les jeunes, les élèves, téléchargent des produits culturels en masse pour les partager et nourrir leurs échanges et la réflexion en ligne, s’appropriant ainsi la culture, l’information et la connaissance, au mépris des droits immémoriaux des auteurs et autres ayants droit. Ces pratiques honteuses cesseront sitôt que la loi sera expliquée…

Pourquoi faudrait-il s’inquiéter enfin du fait que les élèves enregistrent les cours ouphotographient les schémas réalisés en classe pour les revoir plus tard, à la maison, voire les partager à l’intention des autres ? Un simple rappel des conventions et du droit à la l’image et à la propriété intellectuelle, qui s’appliquent à l’école autant qu’ailleurs, devrait suffire…

Non, pas d’inquiétude à avoir ou de souci à se faire, tout devrait bien se passer !

Michel Guillou @michelguillou

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Crédit photo : Cherry blossom season via photopin (licence)

Initialement publié sur le site : http://www.culture-numerique.fr/?p=2922

Dernière modification le vendredi, 10 avril 2015
Guillou Michel

Naturaliste tombé dans le numérique et l’éducation aux médias... Observateur du numérique éducatif et des médias numériques. Conférencier, consultant.